Les bonnes pratiques de l’audit interne
Garantir la pertinence des audits internes demande une bonne préparation, la mise en œuvre de bonnes pratiques et l’établissement d’un climat favorable pour les parties prenantes. L’audit doit être mené dans un climat de confiance.
Pour établir cette relation de confiance l’auditeur doit être à la fois humble et ouvert et mettre en œuvre un certain nombre de bonnes pratiques. C’est ensuite que d’autres qualités doivent être développées : pertinence et exhaustivité du questionnement, capacité d’observation, ténacité, vivacité, faculté de prise de note.
Pour cette rentrée des classes, voici quelques conseils pour vous aider dans la réalisation de vos audits.
1. Structurer la relation avec les audités
Favoriser une relation gagnant-gagnant
L’audit peut être perçu par certains comme un exercice inquisitoire. Les audités peuvent ainsi se sentir jugés et refuser de coopérer. Il s’agit là de la pire situation d’audit qu’il est indispensable d’éviter. C’est à l’auditeur que revient la mission de dédramatiser l’audit et ses enjeux. Cela se fait à deux moments :
- En réunion d’ouverture, où l’auditeur doit expliquer sereinement les objectifs de l’audit et préciser que l’audit est aussi un moyen de valoriser les bonnes pratiques. En d’autres termes, l’audit n’est pas fait que pour mettre en exergue des non-conformités, c’est un exercice constructif.
- Lors de l’audit, où l’auditeur doit (re)présenter à chaque audité rencontré les objectifs et les enjeux de l’audit.
C’est aussi à l’auditeur de structurer une relation positive avec les audités pour leur donner envie de collaborer au processus commun de progrès. L’auditeur doit donc s’inscrire dans une relation gagnant-gagnant avec le(s) audité(s).
Cette relation gagnant-gagnant née d’un climat favorable établi grâce au comportement de l’auditeur qui doit :
- être neutre et ne pas préjuger ;
- écouter sans interpréter et sans devancer la réponse de l’audité (en cas de blocage l’auditeur ne doit pas répondre à la place de l’audité, il doit susciter la réponse) ;
- adopter une attitude objective, sans extrapolation personnelle ;
- éviter d’être influencé par ses propres origines techniques ;
- rester naturel et attentif ;
- bien observer l’interlocuteur (ton, émotion, gestes), pour détecter toute incompréhension, quiproquo ou malaise ;
- déculpabiliser l’audité. Lors d’un audit on cherche les faits, non les coupables ;
- encourager une démarche constructive en faisant appel aux compétences de l’interlocuteur ;
- utiliser le vocabulaire de la maison, poser des questions claires ;
- aider l’audité à clarifier un fait, à sortir d’une impasse ;
- se faire expliquer les réponses ou les termes mal compris ;
- s’interdire de piéger l’audité ;
- faire comprendre à l’audité qu’il n’a nul besoin de se justifier ;
- rester au niveau des faits (discerner les faits exceptionnels, distinguer les faits des opinions).
Voilà autant de bonnes pratiques qui concourent à l’établissement d’un climat de confiance dans lequel l’audit doit se réaliser.
2. Maîtriser le questionnement et la prise de notes
Un bon audit est un audit méthodique
Nous vous précisions dans cet article (Batîr un guide d’audit selon la logique du PDCA et l’approche 5M) la manière de dérouler un audit autour du principe du PDCA. Le questionnement doit donc être fidèle au guide ou questionnaire préparé préalablement.
L’audit peut être appréhendé telle une phase de vente. Dans le cas de l’audit on ne cherche pas à vendre mais à « acheter » des informations. Pour y parvenir de la manière la plus naturelle qui soit et dans un climat de confiance, le questionnement doit être construit de manière méthodique. La méthode de l’entonnoir, issue des techniques de vente peut être appliquée à l’audit.
La reformulation permet ici d’éviter les quiproquos et malentendus et garantit à l’auditeur l’acceptation d’un écart détecté par l’audité. Par exemple : « si j’ai bien compris, vous ne réalisez pas systématiquement les contrôles avant de livrer les produits au client ? »
L’utilisation du QQOQCCP sans abuser P !
Durant les entretiens, l’auditeur est en position d’apprenant face au sachant qu’est l’audité. Le but de l’audit est que l’auditeur comprenne le fonctionnement de l’entité auditée. Pour faire, le recours à un questionnement exhaustif est nécessaire.
L’auditeur peut s’appuyer sur le QQOQCCP (qui, quand, où, comment, combien, pourquoi, Cf. l’article La méthode QQOQCCP, un outil d’analyse simple et performant), mais sans abuser du « pourquoi » !
En effet, le « pourquoi » invite l’audité à se justifier. Or l’audit ne cherche pas à comprendre pourquoi telle ou telle chose n’est pas faite mais à identifier ce qui n’est pas fait ou au contraire ce qui est bien fait.
La réponse au pourquoi est à la charge du responsable de l’entité auditée qui devra y répondre pour entreprendre une action corrective.
La prise de note : rapide, suffisante et précise
Pour éviter de dévier du questionnement préalablement préparé, l’auditeur peut avoir recours à un mémo sur lequel seront consignées les principales questions.
Ce mémo permet en outre d’y consigner les réponses obtenues, servant ainsi de recueil de prise de notes (le mémo préparé au format paysage permet d’y inscrire les notes durant l’audit sur la moitié ou les deux tiers à droite).
La prise de note doit être rapide, suffisante et précise :
- Rapide afin d’éviter de casser le rythme de l’audit ;
- Suffisante pour pouvoir étayer et rendre factuelles les observations effectuées (il ne faut pas oublier de consigner les références des documents examinés, et le nombre de situations observées) ;
- Précise pour pouvoir hiérarchiser les constats d’audit (Cf. l’article Formalisez des constats d’audit pertinents, la qualité de vos audits en dépend).
On retiendra que la prise de note est un exercice qui se travaille et qui s’améliore avec l’expérience. La pratique des audits permettra en outre d’identifier les éléments majeurs de ceux qui le sont moins et qui ne gagnent pas à être consignés.
3. Observer les faits sur le terrain, faire preuve de ténacité
Auditer « à domicile »
L’audit est un exercice d’investigation et comme toute investigation la recherche des faits ne se fait pas qu’en écoutant mais aussi en observant l’environnement dans lequel se déroule l’audit : le lieu de travail des audités. Cela signifie que l’auditeur observera autant de lieux que de personnes auditées.
Se déplacer sur les lieux de travail des audités permet aussi d’éviter la présence des supérieurs hiérarchiques lors de l’audit des collaborateurs. Présents ces derniers peuvent brider le potentiel des audités ou encore favoriser le sentiment de contrôle et d’insécurité.
Une fois sur le lieu de travail de l’audité, l’auditeur doit, tout en menant son audit, observer le fonctionnement « habituel » du service pour détecter d’éventuelles dysfonctionnements.
Être tenace mais pas vorace !
Si il est d’usage de dire que le doute profite toujours à l’audité, il est du devoir de l’auditeur de limiter au maximum les zones d’ombre et de doutes. Ainsi, dès qu’une situation semble ambigüe, l’auditeur doit reformuler ou compléter son questionnement pour clarifier la situation.
C’est à ce niveau que l’auditeur doit faire preuve de perspicacité et de vivacité d’esprit, car étant son propre gardien du temps, il ne peut se permettre de rester trop longtemps sur une même situation à éclaircir. Le questionnement doit donc être précis et direct. Cela demande de faire preuve de tact pour recentrer l’audité sur les attentes de l’auditeur.
Si toutefois, la situation ne se clarifie pas, il faut aussi savoir abandonner et ne pas être trop « vorace » au risque d’agacer l’audité et de perdre sa confiance. Une note peut être consignée dans le rapport d’audit pour préciser la situation ambigüe et pouvoir revenir dessus lors d’un prochain audit.
De même que lorsqu’un écart est détecté, l’auditeur, une fois l’écart accepté, doit passer à un autre sujet et ne pas insister sur l’écart. Le but de l’exercice n’étant pas de trouver des écarts mais de faire progresser l’entité auditée.
Quelques conseils et erreurs à éviter
L’audit est un exercice objectif. Il convient de ne pas se laisser influencer par les dispositions adoptées par les audités. Il s’agit de raisonner en termes de résultats et non de moyens.
De même qu’il ne faut pas reporter sa propre vision ou expérience auprès des audités. Il faut aborder l’audit d’un œil naïf et humble cherchant à comprendre le fonctionnement et à déterminer si ce fonctionnement est performant, c’est-à-dire s’il conduit l’entité auditée à atteindre ses objectifs.
La maîtrise de l’audit réside en grande partie dans la faculté de l’auditeur à s’appuyer sur le processus audité comme fil conducteur, en déployant le PDCA.
- Evitez à tout prix les conflits ! Vous devez vous interdire d’entrer en conflit. Si l’audité refuse de coopérer, arrêtez immédiatement l’entretien et consignez les raisons du désaccord.
- Ne réfutez jamais une affirmation, même « mentalement » et même si vous avez l’intime conviction que l’affirmation exprimée est fausse. Le doute profite toujours à l’audité.
- Bannir certaines expressions du type «à votre place…», «Vous vous contredisez…» «Je ne suis pas d’accord…». Vous n’êtes pas à la place de l’audité. A priori, vous en savez moins que lui. Il est le sachant et vous l’apprenant. L’audit demande une certaine humilité.
- Vous avez le droit de demander des documents et l’audité le droit de refuser. Si l’audité refuse de montrer les documents, n’entrez pas en conflit et consignez le fait que certains documents n’ont pas pu être audités. Vous devez également vous interdire de consulter des documents à la dérobade.
- N’essayez pas de hiérarchiser les constats d’audit durant la phase d’entretien. Aménagez-vous une période à l’issue de l’audit, avant la réunion de clôture pour le faire. A défaut vous risquez de casser le rythme de l’audit et de susciter la méfiance des audités.
Vous voilà avec le plein de bonne idées / pratiques. Si vous souhaitez poursuivre la discussion et échanger vos retours d’expérience, c’est que le forum que cela se passe. A très vite sur le forum et bons audits à vous !
Pour télécharger nos bonnes pratiques, consultez notre espace téléchargement classé par thématiques :
Comments (16)
Merci pour vos articles et votre blog ! Etudiante au CNAM actuellement, j’ai trouvé beaucoup d’infos et une grande aide sur votre blog !
Bonjour,
Je vous remercie pour la pertinence et l’utilité de vos articles.
Mon entreprise, microentreprise, souhaite être certifié ISO 9001.
Est-il nécessaire d’avoir un audit interne avant l’audit blanc de l’organisme certificateur ?
Si personne dans l’entreprise n’a eu de formation spécifique sur les audits internes, une simple formation par un stagiaire qualité suffit-elle pour les former ? L’auditeur interne peut-il être une personne externe mieux qualifiée ?
Merci d’avance !
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Suis un etudiant en master 1 de responsable de systeme de management QSE, alors j’ai beaucoup appris et j’en suis comble vraiment ca ajoute un plus dans mes connaissances.
Merci pour ce super article, ça tombe bien on responsable m’a demandé de l’assister pour l’audit interne de l’entreprise. En tant que stagiaire je suis assez sceptique sur le bon déroulement du reste de mon stage si les entretiens avec les autres collègues ne se passent pas très bien, ou que je fasse quelques remarques qu’ils apprécient pas trop. Je croise les doigts.
article très informatif
Très clair cet article et très pertinent, je vous remercie pour cette parution très encourageante.
Merci
Merci beaucoup pour ce guide très intéressant , ça va contribuer fortement à un très bon déroulement d’audit interne
Je dois faire un audit en appliquant la norme ISO 9001 dans une caisse d’allocations familiales auriez vous éventuellement un plan des bonnes pratiques mise à part vérifier que les processus sont bien appliqués et que la la démarche de qualité intégré est mise en place
merci de votre aide
J’aime beaucoup votre présentation très aérée et vos conseils qui me paraissent bien correspondre à la pratique.
[…] Garantir la pertinence des audits internes demande une bonne préparation, la mise en œuvre de bonnes pratiques et l’établissement d’un climat favorable pour les parties prenantes. L’audit doit être mené dans un climat de confiance.Pour établir cette relation de confiance l’auditeur doit être à la fois humble et ouvert et mettre en œuvre un certain nombre de bonnes pratiques. C’est ensuite que d’autres qualités doivent être développées : pertinence et exhaustivité du questionnement, capacité d’observation, ténacité, vivacité, faculté de prise de note.Pour cette rentrée des classes, voici quelques conseils pour vous aider dans la réalisation de vos audits. […]
Merci Aurélie, Christophe, pour vos retours !
Au plaisir d’échanger.
Merci beaucoup pour cet article qui – comme toujours sur ce blog – aborde le sujet concrètement et efficacement !
[…] Garantir la pertinence des audits internes demande une bonne préparation, la mise en œuvre de bonnes pratiques et l’établissement d’un climat favorable […]
Bonjour Jérémy,
merci pour ce nouvel article frais et pertinent,
la rentrée ne se fait plus attendre !
Bonne continuation…
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